16 Juin 2016
Synopsis: "Une jeune fille débarque à Los Angeles. Son rêve est de devenir mannequin. Son ascension fulgurante et sa pureté suscitent jalousies et convoitises. Certaines filles s’inclinent devant elle, d'autres sont prêtes à tout pour lui voler sa beauté."
Sortie (France): 8 juin 2016
Critique:
Nicolas Winding Refn est un cinéaste singulier, nous lui avons consacré un Grand Angle et pour rester dans la continuité on s'attaque a son dernier film "The Neon Demon" pour voir s'il s'inscrit bien dans sa filmographie. Hugues, un autre membre du site a également pu voir le film, découvrez sa critique tout aussi élogieuse ICI.
La sur esthétisation dans un film peut paraître dénuée d'intérêt; alors que dans "The Neon Demon" c'est ce qui est au coeur de cette oeuvre cinématographique. Chaque plan est pensé pour être un tableau et en cette année 2016, c'est l'un des films les plus beaux que l'on ait vu. Si vous aimez les belles images travaillées avec de la lumière à ne plus savoir quoi en faire, c'est exactement ce que propose ce "The Neon Demon". Le film est d'une virtuosité hallucinante et c'est le genre de long-métrage qui divise par son style; c'est particulier et singulier. Le monde de la mode se prête extrêmement bien à cela avec son ultra-esthétisation. Les fulgurances en terme de mise en scène et surtout celles de la lumière sont poussées à leurs paroxysmes pour imprégner son propos. La féminisation est centrale et tous les mannequins veulent être parfaits.
Jesse entre dans l'arène et elle devient la coqueluche du milieu et c'est bien là l'une des grandes différences avec les autres films de Refn. Le grand thème du réalisateur change cette fois-ci, ce n'est pas l'impuissance d'un homme, mais l'attraction d'une femme; la première fois qu'il met en scène un milieu de femmes et c'est donc une nouveauté dans son cinéma. Son côté artistique va jusqu'à l'identification même de ces personnages, c'est dans la mise en scène qu'ils se dévoilent et aucun n'a qu'une simple caractéristique. C'est jeune fille âgée de 16 ans et vierge, elle subjuge par sa simplicité là où tous les autres-modeles sont refaits et peinent à rester en haut de l'affiche. La couleur rouge ici est encore une fois très présente, car le sang de la virginité et donc de la pureté inonde nos protagonistes.
L'ascension d'une femme qui dérange autant qu'elle fascine, c'est une trame de fond qui soutient sa mise en scène lumineuse qui va loin dans la représentation et l'interprétation. C'est construit comme une photographie ou encore un tableau à néons. Il adopte par la même occasion un rythme assez lent à la "Only God Forgives" avec un mystère qui se dévoile un peu plus pour ne pas être d'un ennui durant tout le long. Le récit est assez discret et certaines pistes narratives qui sont nombreuses tombent à l'eau, le flou s'installe et l'on finit par ne plus comprendre où va le film. Trop d'opportunités qui laissent un peu sur le carreau. Au final, on arrive à accepter la direction qu'il prend, car il suit sa logique; il n'empêche que c'est là une de ses faiblesses. Sans être pauvre l'histoire peine à être intéressante et face aux magnifiques décors, on se sent perdu. L'intrigue que suscite l'oeuvre est quant à elle totale et pour peu que l'on rentre dans cet univers, on est emporté dans ce monde coloré aux multiples facettes. C'est une poupée russe et on peut y voir différents styles; aussi bien de l'horreur, que du thriller ou encore de la SF, mais la plupart le qualifieront surement d'expérimental.
La bande-son est quant à elle encore une fois de très bonne facture, le ton électro se marie à merveille avec la pression constante du mannequina. C'est Cliff Martinez qui à composé cette partition et Sia qui ferme le film avec un générique de fin à l'image de ses 2H. Très proche de celle de "Drive" elle réussit à absorber le spectateur grâce au mélange de la composition du cadre bien evidemment de cette b.o. Là encore, on voit que c'est du NWR, car c'est minutieusement assemblé. Les cadres soutiennent tous ça et intensifient les scènes pour qu'elles soient pertinentes. Un long travelling horizontal ou des plans assez courts vont travailler sur la tension. Les champs-contrechamps peuvent ne pas paraître originaux, mais ça fonctionne ici et il y a plein d'astuces qui sont dans cet ordre d'idée. On pourrait parler de surcadrage tant il y a de lignes de fuites. On dit que Nicolas Winding Refn emprunte beaucoup à de grands réalisateurs, certes, mais il parvient à créer son propre univers tout en allant piocher ici et là.
Elle Fanning est excellente comme dans la plupart de ses autres rôles, elle joue une femme fragile qui se transforme et le passage de l'enfance à l'âge adulte est marqué par le démon, ce qui est original dans ce cas-ci. Jena Malone, elle aussi est intéressante son personnage est profond et plein de paradoxes. Dommage que les autres acteurs soient cantonnés qu'a leurs fonctions. Surtout Keanu Reeves qui ne sert à rien, alors qu'il ne joue pas si mal pour une fois !
"The Neon Demon" est avant tout un film visuel qui base tout sur son esthétique, on adhère ou pas c'est une oeuvre dérangeante, unique, qui dégage une atmosphère particulière, mais solide. Refn a été au bout de son concept avec ce film et pour la suite, il faudrait qu'il change radicalement ou du moins qu'il gomme quelques tics pour surprendre à nouveau. Il y a de longs moments où l'histoire se raconte par les images et non par les dialogues ce qui est une habitude dans le cinéma de NWR, le silence est important et il sert son propos. C'est un paquet alléchant qui nous a plu, car il va à contre-courant de l'industrie tout en allant à fond dans ce qu'il raconte.
Note: (4,5/5)
Courtesy of The Jokers / Le Pacte
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